Voyager, c'est rencontrer. Pour notre petit groupe cela a été aussi d'écrire sur ces rencontres, de mettre sur le papier nos impressions, nos sensations, nos sentiments, notre imaginaire aussi. La visite du mémorial des victimes du communisme a été pour ma part un moment intense, douloureux, physiquement pénible, à imaginer ce qu'un peuple, dont on voulait enlever la mémoire, a pu vivre il n'y a pas si longtemps (jusqu'en 1989 !). Le musée a été terminé en 2000, tout beau, tout propre, reblanchi, mais on peut encore avec peu d'imagination, le revoir noirci d'humidité et de moisissures, avec des cellules glaciales où croupissaient des intellectuels brillants, des personnalités religieuses, des syndicalistes, des hommes et des femmes, des mères avec leurs enfants.La salle où on peut lire les explications sur la répression au niveau religieux.
"La prison de Sighet a été bâtie en 1897 par les autorités austro-hongroises, à l’occasion de l’anniversaire du « premier millénaire hongrois ». Après 1918 elle a fonctionné en tant que prison de droit commun. Après 1945, c’est par Sighet que se faisait le rapatriement des anciens prisonniers et des anciens déportés dans l’URSS. En août 1948, elle devient un lieu de détention pour un groupe d’étudiants, d’élèves et de paysans de Maramures, dont certains vivent encore de nos jours, à Sighet. Le 5 et 6 mai 1950, plus d’une centaine de notables venant de tout le pays – des anciens ministres, académiciens, économistes, militaires, historiens, journalistes, politiciens – ont été emprisonnés à Sighet. Certains d’entre eux étaient condamnés à des peines sévères, tandis que d’autres n’avaient même pas été jugés. La plupart d’entre eux avaient dépassé le cap de la soixantaine." (Texte du site officiel).
Dès l'entrée du musée, des centaines de photos, de noms, surgissent de ces années d'enfer. Chaque cellule, réaménagée en petite salle d'informations sur différents thèmes, la destruction des partis politiques, la répression contre l'Eglise, les étudiants, la culture, les communautés ethniques, (on se demande qui pouvait bien vivre encore "normalement" à cette époque !), la soviétisation de la Roumanie, la résistance, les femmes dans la prison, nous donne à imaginer les ravages subis et à mieux comprendre ce pays opprimé pendant tellement d'années. Les langues se délient doucement, les gens nous parlent maintenant de cette époque, ceux qui en ont profité comme ceux qui en ont souffert, le peu qu'il en reste...
Et bien sûr la question que chacun se pose : et moi, qu'aurais-je fait ?
"Dans les années 1946-1989, le régime communiste et sa police politique, la Securitate firent de la vieille prison préfectorale austro-hongroise un mouroir pour détenus politiques et d'opinion où périt une partie de l'élite intellectuelle et politique de la Roumanie parlementaire d'avant-guerre, dont l'ancien premier ministre démocrate Iuliu Maniu et l'historien et homme politique Georges Bratianu (tous deux sont décédés en 1953). Après la chute de la dictature, fin 1989, la prison est devenue un «Mémorial des Victimes du Communisme», reconnu en 1998 par le Conseil de l'Europe comme «Lieu de Mémoire de l'Europe», comme celui d'Auschwitz et celui de la Paix en Normandie. Ce Mémorial jouxte le monument aux victimes de la Shoah et de nombreuses commémorations se font simultanément: selon Ana Blandiana, fondatrice du mémorial, «Sighet est une petite ville à côté de Berlin: nous ne pouvons pas nous permettre de nous diviser, de fragmenter nos mémoires, et il serait atroce de banaliser celle des voisins pour mettre en exergue la nôtre, car lorsque la justice ne parvient pas à devenir mémoire, seule la mémoire peut devenir justice»" Extrait de l'article sur Sighet (Wikipedia)
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