Jodhpur, la ville bleue,
S’il y a une heure où il est bon
de ne pas circuler à Jodhpur c’est bien dix heures du matin. Les bureaux
commencent à cette heure-ci pour la majorité et les fonctionnaires comme les
autres ne s’agitent guère pour arriver en avance. Ce qui fait que tout le monde
se rue à 9 h 55 sur sa voiture, sa moto, son scooter, son vélo, le rickshaw,
impossible à obtenir car ils sont déjà tous remplis, le bus, plein comme un
œuf. Tout ce monde motorisé se retrouve à klaxonner pour passer en force le
rond-point, à klaxonner toujours pour passer à droite ou à gauche du véhicule
qui semble ralentir, à klaxonner encore pour pousser le cul décharné de la
vache stationnée en plein milieu et mâchant délicatement son sac plastique. Pas
de circulation possible sans klaxon, ce qui rend la vie des touristes un peu
stressante peu habitués que nous sommes à nous faire abîmer les tympans au
moindre pas.
Dix heures, c’est l’heure aussi
du nettoyage : dans les bureaux, dans les maisons, dans les rues et en marchant
paisiblement, on peut recevoir indifféremment sur les pieds, dans les jambes ou
sur la tête, tout dépend à quel niveau des escaliers la balayeuse se trouve, un
nuage de poussières, des papiers sales ou un reste de seau d’eau grasse. Ceux
qui balaient devant leur magasin ne savent pas qu’il faut arroser pour éviter
de balancer la poussière dans la figure des passants et le camion poubelle
laisse s’envoler les plastiques qu’il vient de ramasser.
le ramassage des plastiques fait par deux gamines près de la place du marché |
Dix heures c’est l’heure où les travaux dans la rue battent
leur plein, le camion citerne vide son eau dans la rue qui va à l’hôtel ce qui
oblige à des politiques de contournement invraisemblables, à des calculs
puissance dix dignes d’un grand maître de jeu d’échecs pour pouvoir sauter d’un
petit morceau de trottoir sec sur une minuscule île de goudron afin d’atteindre
un petit tas de sable qui nous permettra en nous mettant de la boue jusqu’au
milieu des orteils de traverser dangereusement cette partie du territoire. Les
habitants compatissants, vous indique la petite ruelle à atteindre pour vous
remettre les pieds au sec et arriver à destination.
le choix de bijoux tient toujours une grande place dans les achats des femmes |
Cette femme vient d'acheter des bracelets neufs et la vendeuse casse directement sur son bras ses anciens bracelets en verre coloré. |
Même pour acheter des ballons, on va longuement hésiter sur la couleur ! |
Dix heures c’est l’heure où le
marché s’éveille, les légumes sont en place, les marchands de bimbeloterie et
de droguerie vantent leurs balais et leurs cuvettes, les vendeuses de bracelets
font rentrer de force les ronds de métal brillant ou de verre coloré aux bras
des clientes, les marchands d’épices, une des grandes spécialités à Jodhpur, se
font une concurrence effrénée, chacun étant là au moins depuis une dizaine d’années
ou plus, avant son proche voisin, tous ayant des dénominations quasi semblables
pour tromper les clients qui ne font pas attention.
Achats pour le repas de midi, les petits pois sont en ce moment à 20 roupies le kilo, il faut en profiter car ils sont délicieux ! |
pas de stress pour faire les courses, on prend le temps de s'asseoir et de discuter |
Dix heures c’est l’heure à Sardar
Market de manger une omelette dans une minuscule boutique recommandée par le
Lonely Planet, l’heure aussi de déguster sous la Clock Tower le plus fameux
lassi au safran de la ville (yaourt battu et parfumé qu’on déguste avec une
paille).
Dix heures, chacun vaque, marche,
installe son petit chariot roulant avec ses mouchoirs à vingt roupies ou ses
paquets d’encens aux multiples parfums.
Je parie que vous ne connaissez pas cette boutique d'encens, pourtant connue mondialement ! |
Chacun installe sa marchandise, essuie
ou plutôt fait s’envoler la poussière avec un petit plumeau sur son étal.
Jusqu’au soir où la Tour de l’Horloge va s’allumer d’étages multicolores, la
foule va aller, venir, les gamins vont essayer d’obtenir quelques roupies
d’innocents étrangers, les chargements d’étoffes, foulards, turbans, saris,
vont circuler à vélo, en char à bœuf ou en voiture à cheval, en moto ou par
sacs dans les rickshaws, vont passer de la fabrique à la teinturerie, puis chez
le grossiste pour partir ensuite bien empaquetés dans des tissus blancs
cachetés de cire un peu partout en Inde et dans le monde.
déchargement de colis dans une petite rue de la vieille ville |
livraison de beaux tissus rouges en vélo |
Et là, ce petit bout de chou, seule au milieu de la place, tenant ses deux paquets de biscuits, que fait-elle ? |
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